Crédit photo: Jean-Marc Lecouturier
La Fondation Rivières vient de compléter une concertation d’envergure pour la protection de la rivière Richelieu, en collaboration avec l’organisme de bassin versant COVABAR. Le projet Actions concertées pour un modèle de cohabitation durable sur la rivière Richelieu a duré un an et il avait pour but de développer des accès aux berges naturels et respectueux des écosystèmes, de définir un mécanisme de partage de la voie fluviale et de mettre en valeur le potentiel touristique de la rivière Richelieu.
Nous avons réuni plus d’une trentaine d’acteurs autour de la table : municipalités, MRC, représentants des organisations de tourisme et représentants des usagers. Six réunions de concertation et une rencontre finale de présentation se sont succédé pour arriver à un plan d’action ambitieux et collectif, qui vous sera bientôt dévoilé dès que nous aurons eu l’occasion de le présenter aux élus.
En attendant, voici quelques apprentissages importants que nous avons faits au cours de la dernière année.
La rivière Richelieu: une rivière bien plus naturelle que ce que nous pensions
Les 125 km de la rivière Richelieu traversent de grands centres urbains: Saint-Jean-sur-Richelieu, Chambly, Beloeil, Mont-Saint-Hilaire et Sorel-Tracy. C’est une voie de navigation d’importance qui fait le lien entre les États-Unis et le Québec. A priori, en se promenant sur les berges (aux endroits où c’est possible), on a plus de chance d’apercevoir des murs de soutènement en béton et des bateaux de plaisance que des espèces rares ou des milieux très naturels, agréables à contempler.
Et pourtant, la rivière Richelieu abrite près de 50 espèces en situation précaire (oiseaux, poissons, amphibiens, etc.). C’est la deuxième rivière possédant le plus de biodiversité aquatique au Québec après la rivière des Outaouais ! L’espèce vedette est le chevalier cuivré (Maxostoma hubbsi), puisque c’est le seul endroit où ce poisson, unique au monde, se reproduit. Les deux dernières frayères de ce poisson s’y dissimulent. La rivière est importante aussi pour de nombreuses autres espèces moins connues : le minuscule et méconnu dard de sable (Ammocrypta pellucida), la plus petite des sarcelles, la Sarcelle à ailes vertes (Anas crecca carolinensis), ou l’étrange et discrète tortue molle-à-épine (Apalone spinifera).
De fait, on trouve plusieurs secteurs protégés le long de la rivière qui compte 1 490 hectares de terrain (îles et berges) protégés entre autres par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs et Conservation de la Nature Canada. Mais, c’est loin d’être suffisant pour permettre de conserver une rivière en bonne santé. Le projet de concertation s’inscrit dans ce contexte: en proposant aux différents acteurs l’aménagement de la rivière et de ses accès, il espère améliorer sa préservation, ainsi que la bonne cohabitation entre les différents usagers.
Naviguer d’accès en accès: dresser un bilan réel sur la rivière
Aucun recensement officiel et à jour n’était disponible en début de projet pour donner un portrait réel des accès disponibles sur la rivière Richelieu. Dans le sud du Québec, la privatisation des berges et le manque d’accès aux berges est préoccupant. C’est d’ailleurs pour cela que nous faisons chaque année des Grand Splash, à différents endroits du Québec. Notre première mission lors du projet a donc été de faire un recensement de ces accès.
Des rencontres et des contacts individuels avec les 25 municipalités ont permis de dresser un portrait à jour des accès pour les citoyens. En date du juin 2024, on comptait donc près de 71 accès sur la rivière Richelieu, parmi lesquels :
- 36 accès municipaux
- 5 accès fédéraux
- 30 accès privés commerciaux, dont la plupart sont des marinas.
Ce portrait est en constante évolution: plusieurs municipalités ont des projets d’ouverture ou d’amélioration des accès à la rivière. Avec sa piscine en eaux vives, Beloeil vient de bonifier son accès à la rivière.
La rivière Richelieu: une rivière saturée d’embarcations à certains endroits
La rivière Richelieu n’est pas très profonde et devient de plus en plus étroite à mesure que l’on s’approche de son embouchure. Or, sa position stratégique proche de Montréal et en Montérégie fait qu’elle est un terrain de jeu idéal pour de nombreux Québécois. De plus, depuis la pandémie, l’engouement pour les sports nautiques non motorisés, et particulièrement la planche à pagaie, ne faiblit pas et ajoute du trafic à une rivière déjà bien achalandée. Ajoutons à cela les usages plus ponctuels, mais tout aussi importants: pêche, plongée, baignade.
Au moment de notre recensement, environ 70% des accès pouvaient accueillir des bateaux à moteur, 60% des embarcations non motorisées (canot, kayak, planche à pagaie) et une minorité étaient pensés pour la pêche ou la baignade. Lorsque des accès sont destinés à plusieurs types d’embarcation, la cohabitation n’y est pas toujours facile : certains accès mixtes (bateaux à moteur et non motorisés) deviennent plus difficiles à utiliser les fins de semaine de fort achalandage pour les canots, kayaks et planches à pagaie, en raison des fortes vagues et du grand nombre de bateaux sur l’eau.
Le dialogue avec les municipalités et les personnes fréquentant la rivière Richelieu nous a permis de comprendre que certaines zones de la rivière étaient particulièrement saturées, en raison d’un fort achalandage ou des caractéristiques très sensibles du milieu naturel. Parmi elles : le bassin de Chambly, la zone en face de Saint-Ours et Saint-Roch, l’embouchure, proche des prises d’eau de Sorel-Tracy.
Il est nécessaire de prendre des mesures collectives afin d’assurer à la fois la sécurité de toutes les personnes fréquentant la rivière, mais aussi de permettre de conserver le milieu en bon état. De nombreuses actions de notre plan d’action visent cette cohabitation durable. Restez à l’affût pour en apprendre davantage dans les prochaines semaines !
Ce projet est soutenu financièrement par le gouvernement du Québec dans le cadre de Destination durable et action concertée, une mesure de soutien coordonnée par le Fonds d’action québécois pour le développement durable (FAQDD) découlant du Plan pour une économie verte 2030 et du Plan d’action pour un tourisme responsable et durable 2020-2025.