Montréal, le 3 avril 2023
Projet d’expansion du parc à résidus miniers de la mine de fer du lac Bloom
Environnement et Changement climatique Canada
Section des mines, Division des mines et du traitement
351, boulevard Saint-Joseph, 11e étage
Gatineau QC K1A 0H3
Objet : Projet d’expansion du parc à résidus miniers de la mine de fer du lac Bloom
Madame, Monsieur,
Par la présente, Eau Secours et Fondation Rivières souhaitent vous communiquer leurs préoccupations et demandes concernant l’avis de Modifications au Règlement sur les effluents des mines de métaux et des mines de diamants pour le projet du lac Bloom.
Cela fait maintenant quelques années que nos organismes et nos nombreux partenaires – que l’on parle d’organismes citoyens et environnementaux, de communautés ou d’individus engagés – suivent le dossier d’expansion du parc à résidus miniers de la mine du lac Bloom avec attention. Notre participation à tous et à toutes au Bureau d’Audience Publique sur l’Environnement (BAPE) et les analyses de cette instance ont permis au BAPE de rejeter, sans équivoque, la proposition de Minerai de Fer Québec en 2021. Parmi les arguments ayant mené à ce rejet, on relèvera l’évidente possibilité d’utiliser l’une ou l’autre des gigantesques fosses creusées par le promoteur pour qu’il entrepose les déchets que leur excavation génère. Dans l’esprit populaire, cela relève du gros bon sens. Dans l’esprit d’analystes consultés lors de démarches antérieures, cela relève de la responsabilité du promoteur. Dans l’esprit des analyses économiques ayant été réalisées, cela relève d’une solution techniquement et économiquement faisable. Il n’y a réellement que dans l’esprit du promoteur lui-même que cette solution demeure impossible à envisager pour des raisons purement économiques et, comme nous le démontrerons plus bas, purement spéculatives.
Nous n’en serions pas, aujourd’hui, à vous transmettre cet énième mémoire concernant ce projet désastreux si le gouvernement provincial avait fait ses devoirs, avait assumé son rôle de défenseur du territoire contre les projets mal développés et avait suivi la recommandation du BAPE l’incitant à exiger du promoteur qu’il retourne à sa planche à dessin pour développer une meilleure solution ne sacrifiant pas inutilement huit lacs, dont un de 88 hectares. Or, le gouvernement provincial a flanché devant l’argument économique du promoteur et a, pour ce faire, passé outre les avis des experts au profit d’opinions mal étayées par des fonctionnaires et des consultants défendant davantage des intérêts particuliers que l’environnement que l’on s’apprête à sacrifier. Ce gouvernement se cache par ailleurs derrière une apparence de processus consultatif impliquant la population et les différents acteurs concernés, mais nos analyses révèlent que plusieurs éléments pointent dans la direction de processus d’analyse et décisionnels carrément viciés. Nous étayerons ces points plus bas.
Depuis cette décision désastreuse que rendait le gouvernement du Québec d’accepter ce projet négligent, mal monté, mal mené, mal orienté, mal encadré et inutilement destructeur, Eau Secours et Fondation Rivières, notamment – mais également avec le support indéfectible de nombreux.ses allié.es – ont entamé des démarches d’analyse de la décision rendue pour relever des lacunes graves dans les processus d’évaluation de ce projet. Ces démarches ont par ailleurs permis de relever combien la raison
d’être de la solution retenue est mal appuyée, combien l’analyse déposée est lacunaire, combien les instances gouvernementales, tant fédérale que provinciale, à un moment où à un autre, ont pu faire preuve de laxisme et combien il n’y a aucune urgence à aller de l’avant avec une telle solution précipitée et mal orientée. Nous tâcherons donc, ici, de faire la démonstration de l’historique particulier et hautement inquiétant qui caractérise le développement de la mine du lac Bloom. Nous enchaînerons avec les lacunes observées au niveau de l’analyse du projet et du processus décisionnel. Nous terminerons ensuite sur le manque évident de raisons valables justifiant le sacrifice inutile de ces lacs.
Quelques points additionnels viendront appuyer l’ensemble de nos démarches et réflexions. Le mémoire passé d’Eau Secours, déposé au BAPE tenu en 2020, est disponible en Annexe du présent mémoire. Se trouve également, à sa suite, une revue de presse non exhaustive faisant état de la précarité de l’eau au Québec comme ailleurs dans le monde et illustrant combien l’eau n’est pas cette ressource infinie de laquelle on peut disposer comme bon nous semble – contrairement à certaines idées reçues voulant
qu’elle soit infinie et infiniment renouvelable. Enfin, également en annexe, se trouve joint un texte rédigé par Raymond Lemieux, journaliste, et faisant état du processus douteux encadrant l’analyse et la prise de décisions concernant le développement de cette mine de fer.
En résumé, nos principales revendications
- Refuser la demande du promoteur de sacrifier des lacs pour l’entreposage de ses déchets miniers;
- Exiger du promoteur qu’il développe et applique une solution de rechange à l’entreposage de ses déchets miniers ne sacrifiant aucun lac, de même que des scénarios sérieux de remblaiement des fosses afin de limiter au maximum l’impact de l’entreposage de déchets hors de ces fosses;
- Accorder un délai supplémentaire à la société civile pour soumettre de la documentation et des avis, dans l’objectif avoué de permettre l’aboutissement de démarches entamées par les organismes Fondation Rivières et Eau Secours auprès du ministère provincial des Ressources Naturelles et des Forêts. Ces informations que nos organismes espèrent pouvoir obtenir par voie d’accès à l’information vous seront, pour leur part, transmises sans délai dès lors que nous les obtiendrons;
- Tenir compte du laxisme au niveau des évaluations et des autorisations dont ont historiquement bénéficié les différents propriétaires de la mine du lac Bloom;
- Tenir compte des lacunes relevées dans les analyses dont les différents projets d’expansion de la mine du lac Bloom ont bénéficiés, facilitant leur acceptation.
Photo : Mine du lac Bloom, BBA Consultants