Montréal, le 12 novembre 2018
TRANSMISSION PAR COURRIEL
Madame MarieChantal Chassé, Ministre
Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
Édifice Marie-Guyart
675, boulevard René-Lévesque Est, 30e étage
Québec (Québec) G1R 5V7
Objet : Déversements planifiés d’eaux usées municipales
Madame la Ministre,
Nous désirons d’abord vous féliciter pour votre nomination. Nous vous assurons de l’entière disponibilité de l’équipe de la Fondation Rivières pour collaborer avec votre ministère à l’avancement de la protection de l’environnement. Lors de notre rencontre à la soirée-anniversaire de la SCABRIC, j’ai été en mesure d’apprécier plus particulièrement votre attachement au dossier de l’eau qui a fait l’objet de votre premier discours à titre de députée.
Cette semaine, la ville de Longueuil procédera à un déversement planifié des eaux usées d’une partie de son réseau d’égouts municipaux, et cela pour une durée maximale estimée à 8 jours. Cette situation est causée par la réalisation de travaux de remplacement d’une conduite principale située dans le lit du Saint-Laurent. Les explications fournies par la Ville, en conférence de presse, apparaissent valables à première vue. Il apparaît toutefois clairement que des efforts supplémentaires doivent être réalisés pour limiter ces déversements, et ce essentiellement au niveau gouvernemental.
Le déversement planifié de la ville de Montréal, en 2015, que nous avons étudié minutieusement, a permis de tracer un chemin dans les mesures devant être prises par les institutions municipales. À la suite des autres déversements qui ont eu lieu, et maintenant devant celui de la ville de Longueuil, nous vous incitons à mettre en place un meilleur contrôle de ceux-ci. La population doit être rassurée une fois pour toutes quant aux efforts réalisés pour contraindre, limiter et encadrer ces épisodes de déversements.
Ainsi, à la lumière des événements de Montréal, Gatineau, Québec et Longueuil, nous recommandons que le Ministère assume un meilleur contrôle préventif de tels événements en :
- En désignant un responsable ministériel pour l’évaluation technique et le suivi de tels événements. À notre connaissance ce sont actuellement les directions régionales qui reçoivent et évaluent les différentes situations. Or, une évaluation technique requiert des connaissances spécifiques en génie civil, dans la gestion de réseaux et du traitement des eaux le cas échéant. Ce responsable aurait également pour mandat d’élaborer et de maintenir à jour l’expertise acquise en effectuant un suivi serré des événements. Les informations pertinentes devraient être mises en ligne.
- En produisant une liste d’activités que l’exploitant doit impérativement réaliser, selon l’importance du déversement. Ces activités doivent être pertinentes et accompagnées d’objectifs précis et mesurables. Certaines activités peuvent s’avérer superflues s’il y a un manque d’encadrement. On note actuellement, dans le dossier de Longueuil, qu’il est prévu de faire un échantillonnage des eaux du Saint-Laurent en 20 endroits avant/pendant/après l’événement alors que certains pourraient ne pas être touchés par l’événement, l’inspection des rives sur une distance et une méthode non-définie avant/pendant/après, une demande de réduire la consommation d’eau par les résidents, etc. Tout cela alors que des sources de pollution particulières, provenant d’industries ne semblaient pas avoir été identifiées. C’est pourquoi nous souhaitons que les efforts et budgets soient affectés en vue d’obtenir des résultats concrets.
- En identifiant des mesures obligatoires que devraient respecter les municipalités, telles la mise en place d’ouvrages ou de traitement temporaires, l’utilisation d’un devis incitant les entrepreneurs à réaliser rapidement les travaux, l’identification de rejets industriels ou hospitaliers à gérer de façon particulière, etc.
- En exigeant la production d’un rapport d’événement en fin d’activité demandant à l’exploitant un bilan des activités et mesures réalisées. Ce rapport devrait contenir une section recommandations afin d’analyser, développer, faire connaître au public et partager entre les différentes instances municipales les expériences acquises lors de chaque événement.
- En modifiant l’article 15 du règlement sur les ouvrages municipaux d’assainissement afin de rendre obligatoire l’obtention d’une autorisation ministérielle avant d’effectuer un déversement. Cette autorisation serait émise sous réserve de l’exactitude des informations déposées.
- En instaurant une redevance sur le volume d’eaux usées non-traitées déversé afin que les municipalités soient incitées à prendre des mesures sérieuses pour le minimiser. Cette redevance devrait être versée au Fonds vert, pour la protection de l’eau. Elle pourrait être de l’ordre de 1 $/ mètre cube déversé, ce qui correspondrait dans le cas de Longueuil à 162 000 $ pour les 162 000 mètres cubes devant être déversés. L’exploitant pourrait aussi, à son choix, verser une redevance majorée pour des travaux d’infrastructures supplémentaires qui permettraient d’améliorer la performance du système d’assainissement. La redevance devrait, dans ce cas, être suffisamment majorée pour qu’elle demeure incitative à réduire le volume déversé.
En vous remerciant pour l’attention portée à la présente, nous demeurons disponibles pour toute information supplémentaire.
Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos sentiments distingués.
Alain Saladzius, ing., FIC
Président, Fondation Rivières
Photo : Dmitry Bukhantsov/Unsplash