Montréal, le 15 avril 2021
TRANSMISSION PAR COURRIEL
Monsieur Benoit Charette, Ministre
Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques
Édifice Marie-Guyart
675, boulevard René-Lévesque Est, 30e étage
Québec (Québec) G1R 5V7
Objet : Pollution occasionnée par les neiges usées – Demande de révision des normes et procédures
Monsieur le Ministre,
Des images captées par des citoyens depuis quelques jours à Longueuil et diffusées sur les réseaux sociaux montrent une eau polluée sortant d’un bassin de décantation de la Ville. L’émissaire s’écoule directement dans un ruisseau d’une eau limpide, dans le boisé du Tremblay, un refuge faunique d’importance de la rainette faux-grillon au Québec. Des grenouilles et des poissons morts y ont été observés et un silence complet régnait alors qu’en temps normal le cri des rainettes se fait entendre en pleine saison printanière.
En 2018 nous avions déjà observé une situation inquiétante en bordure de la rivière Magog et, après analyse, nous avions porté plainte au ministère de l’Environnement en juillet 2018. Les résultats affichaient des dépassements majeurs des matières en suspension. Un tableau du Guide d’aménagement des lieux d’élimination de neige et mise en œuvre du Règlement sur les lieux d’élimination de neige mentionne qu’il suffit de respecter un ou l’autre des critères et non pas tous les critères, pour être conforme aux exigences. Il s’agit d’un encadrement trop laxiste. Le Ministère s’est malheureusement limité à effectuer un suivi de l’exploitation avec la Ville de Magog, sans toutefois resserrer les normes environnementales du site.
Or, c’est justement la faiblesse des normes qui conduit à la pollution intense observée à Longueuil. Les critères de conception doivent être resserrés pour certains sites afin de tenir compte de la fragilité du milieu récepteur et une inspection, avec échantillonnage adéquat, doit être réalisée aux moments critiques et non aléatoirement. De simples bassins de décantation, trop petits de surcroît, ne permettent d’enlever que les principales matières grossières, comme le sable et les déchets de plastique. De nombreux autres contaminants (chlorures, sels, métaux, huiles et graisses, microplastiques, etc.) provenant des neiges souillées s’échappent ainsi jusqu’aux cours d’eau. De tels apports modifient aussi brusquement les conditions physico-chimiques (ex: pH, conductivité, oxygène dissous, température) et posent des risques de mortalité subite pour plusieurs organismes aquatiques.
Les normes sont les mêmes partout, un non-sens, alors qu’elles devraient s’appuyer sur des objectifs environnementaux de rejets spécifiques au cours d’eau récepteur, comme cela se fait scrupuleusement pour tous les systèmes municipaux de traitement des eaux usées.
Nos autres recommandations se résument ainsi :
- Établir une liste des sites et de leur point de rejets, la rendre publique sur le Portail des connaissances sur l’eau;
- Demander des modifications aux installations déficientes, ou à leur gestion;
- Exiger que les rejets soient non-toxiques et s’assurer que les valeurs de pH, de conductivité, de température et d’oxygène dissous au sein des milieux récepteurs soient maintenus dans un éventail qui ne menace pas la survie immédiate des organismes aquatiques (des mortalités de poissons ont été constatées à Longueuil);
- Revoir les normes en tenant compte de périodes de fonte intensives et de l’effet des changements climatiques.
Nous demandons ultimement que soient revues les autorisations émises pour que soient intégrées les modifications apportées au Guide en septembre 2020.
Nous demeurons disponibles pour toute information supplémentaire.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos salutations distinguées.
Alain Saladzius, ing., FIC
Président, Fondation Rivières
Photo : Joy Real/Unsplash